A l’aube de l’entrée en vigueur du nouveau droit de la société anonyme au 1er janvier 2023, il convient de revenir sur un sujet ayant fait l’objet de plusieurs publications sur notre blog cette année : le contrôle spécial.
Cette révision prévoit de manière générale le renforcement des droits des actionnaires qui verront leur droit à l’information se développer et pourront par exemple obtenir des renseignements en dehors de l’assemblée générale (voir à ce sujet la précédente contribution de Me Gomes à ce sujet du 23 février 2021).
Un certain assouplissement des conditions d’institution du contrôle spécial, qui s’intitulera désormais « examen spécial », a également été adopté par les Chambres fédérales. En pratique, et comme le relevait déjà Me Ema Bolomey dans une précédente contribution à lire ici , cette action demeure méconnue des actionnaires et n’est que très peu accordée par les Tribunaux.
Avec cette révision, le législateur tente de concilier le droit aux renseignements de l’actionnaire avec les secrets d’affaires de la société devant être protégés.
Dès le 1er janvier 2023, si l’assemblée générale refuse l’institution d’un examen spécial, les actionnaires pourront demander au tribunal d’en ordonner un à des conditions assouplies par rapport à l’ancien droit.
Le nouvel article 697d CO abaisse le seuil requis pour les actionnaires de sociétés cotées en bourse à 5% du capital-actions ou des voix. L’abaissement de cette valeur augmentera les chances d’instituer un contrôle spécial pour les personnes impliquées financièrement dans l’entreprise et permettra probablement de développer l’attrait de cette institution.
Pour les sociétés dont les actions ne sont pas cotées, le seuil de 10% du capital-actions demeurera pour requérir l’institution d’un tel examen.
Le nouvel article 697 al. 3 CO prévoit que « le tribunal ordonne un examen spécial lorsque les requérants rendent vraisemblable que des fondateurs ou des organes ont enfreint les dispositions de la loi ou des statuts et que cette violation est de nature à porter préjudice à la société ou aux actionnaires, à condition que ces déclarations soient suffisamment étayées ».
A la différence du droit en vigueur, il ne sera donc plus nécessaire de rendre vraisemblable un préjudice effectif à la société ou aux actionnaires ; il suffira que la violation soit de nature à porter préjudice.
Le Message du Conseil fédéral relatif au nouveau droit de la SA explique à cet égard que « lorsque des organes de la société ont vraisemblablement enfreint la loi ou les statuts d’une manière susceptible de porter préjudice, il n’y aucune raison d’attendre pour instituer un examen spécial, que le préjudice ait effectivement eu lieu. Une minorité d’actionnaires doit pouvoir agir à titre préventif, autrement dit avant que le préjudice ne survienne[1] ».
L’article 697g al. 1 CO précise désormais expressément que les experts chargés de l’examen spécial devront rendre compte par écrit du résultat de leur enquête au juge l’ayant institué, tout en préservant le secret des affaires. En pratique, cette forme était déjà respectée par les experts sans que la loi ne le prévoie.
La procédure en examen spécial permet aux actionnaires d’apprécier la véritable situation de l’entreprise et d’évaluer les chances de succès d’une action en responsabilité ou en restitution à l’encontre du conseil d’administration. Les informations obtenues dans ce cadre pourront constituer des moyens de preuve en vue dans de telles procédures.
Le nouvel article 758 al. 2 CO prévoira désormais la suspension des délais durant la procédure visant l’institution d’un examen spécial et l’exécution de celui-ci.
Ces modifications vont très certainement développer l’institution de l’examen spécial et faire de lui un réel instrument à disposition des actionnaires.
WILHELM Avocats – Me Léa Wyssbrod, avocate-stagiaire
[1] FF 2017 353, p. 140 (https://www.fedlex.admin.ch/eli/fga/2017/112/fr)
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