Droit des sociétés

Les sociétés anonymes ne doivent pas oublier les ayants droits économiques de leurs actions

Depuis le 1er juillet 2015, même après l’abrogation des actions au porteur (voir notre blog du 18 novembre 2019), le code suisse des obligations impose à toute société anonyme de tenir une liste des ayants droits économiques des actions annoncés à la société lors d’un transfert atteignant le seuil de 25 % et cela quel que soit le type de celles-ci (au porteur ou nominatives). Le régime actuel est toutefois délicat à manier car de nombreuses dispositions sont actuellement encore provisoirement en vigueur et seront bientôt abrogées. En outre le nouveau droit de la SA s’annonce prochainement. Gageons que son entrée en vigueur remettra encore ces questions sur le tapis des assemblées générales et des conseils d’administration durant les années à venir. Ceux-ci seraient donc bien avisés d’anticiper les changements à venir tant ceux-ci seront délicats à gérer dans l’urgence.


Selon l’art. 697j CO, dans sa teneur actuelle, quiconque acquiert, seul ou de concert avec un tiers, des actions d’une société non cotée et dont la participation, à la suite de cette opération, atteint ou dépasse le seuil de 25% du capital-actions ou des droits de vote, est tenu d’annoncer dans un délai d’un mois à la société le nom et l’adresse de la personne physique pour le compte de laquelle il agit en dernier lieu.


L’art. 697l CO prévoit la tenue de la liste des ayants droits. Cette disposition légale a été révisé par la novelle du 21 juin 2019 (FF 2019, pp. 4313 et ss.) et sa nouvelle teneur entrera en vigueur le 1er mai 2021 prochain dans sa version modifiée. Elle ne s’adressera alors plus qu’aux actions nominatives et prévoira que la société tiendra une liste des ayants droits « qui lui ont été annoncés ». Est-ce à dire que seuls les transferts atteignant le seuil de 25 % susmentionnés tomberont sous le coup de cette annonce ? On peut raisonnablement le soutenir. Une application plus extensive à toutes les actions nominatives n’est pour le moment pas conforme à la lettre de la loi, mais, transparence oblige, une telle évolution n’est pas à exclure dans un proche avenir …


En tout état de cause, quoi qu’il arrive, cette liste doit mentionner si ces ayants droits sont des personnes physiques, le prénom et le nom ainsi que la nationalité et la date de naissance de ceux-ci et, s’il s’agit de personnes morales, leur raison sociale. L’adresse de ces ayants droits doit également figurer dans cette liste.


Cette liste doit être tenue par le conseil d’administration de la société de manière à ce qu’il soit toujours possible d’y accéder en tout temps en Suisse. Les pièces justificatives relatives à cette liste doivent être conservées par la société au moins pendant 10 ans après la radiation de la personne figurant sur la liste.


Après l’abrogation des actions au porteur, l’assemblée générale ne pourra bientôt plus prévoir que cette liste soit tenue par un intermédiaire financier au sens de la loi fédérale sur le blanchiment d’argent. Cette faculté s’éteindra en effet 18 mois après l’entrée en vigueur de la novelle précitée, soit le 1er mai 2021.


Notre pratique nous montre que les sociétés anonymes ont passablement ignoré ces dispositions. Pour celles que cela concerne, il convient de se préparer pour ne pas se trouver exposé aux conséquences relativement importantes d’un manquement à ces obligations.

Vous avez des questions par rapport à la problématique abordée dans cet article ?

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