Droit des sociétés

Même pour les petites sociétés, un règlement d’organisation du conseil d’administration n’est pas un luxe inutile

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En application de l’article 716b du code des obligations (CO), le conseil d’administration peut se doter d’un règlement d’organisation permettant de prévoir non seulement son organisation mais également la délégation de la gestion de la société à un ou plusieurs membres ou même à des tiers. La période de pandémie a montré que ce type de règlement n’est pas un luxe, même pour les petites sociétés.


Selon l’article 716a CO, il incombe au seul conseil d’administration d’exercer la haute direction, d’établir les instructions nécessaires et de fixer l’organisation de la gouvernance de la société. Il s’agit d’attributions inaliénables et intransmissibles à d’autres organes de la société comme l’assemblée générale ou des tiers même nommés par le conseil d’administration. La gestion et la gouvernance de la société anonyme incombent donc au seul conseil d’administration.


Le conseil d’administration agit collectivement en tant qu’organe de la société. Comme le précise l’article 716b al. 3 CO, « la gestion est exercée conjointement par tous les membres du conseil d’administration ». Cette mention mise à part, la loi ne définit toutefois pas comment le conseil d’administration doit s’acquitter de cette compétence. Elle se contente de la lui attribuer.


Bien qu’il ne s’agisse pas de dispositions nécessaires au sens de la loi, les statuts doivent donc fixer les modalités de de la convocation des séances du conseil d’administration, leur fréquence, la façon dont ces séances peuvent se tenir et leur enregistrement dans les actes de la société. Rappelons dans ce cadre que les administrateurs ne sauraient se faire représenter aux séances du conseil d’administration. Liés par un devoir de diligence et de fidélité, ils sont tenus d’y assister.


La loi permet toutefois au conseil d’administration de déléguer la gestion de la société à un ou plusieurs administrateurs ou à des tiers si cette délégation est expressément prévue dans les statuts de la société. Il s’agit donc d’une délégation qui permettra dans une large mesure de libérer le conseil d’administration de la responsabilité prise dans le cadre fixé par le règlement d’organisation.


Le règlement d’organisation est édicté par le conseil d’administration lui-même et peut être adopté à une majorité simple de ses membres, sauf disposition particulière des statuts à ce sujet. Il n’a pas besoin de le faire approuver par les actionnaires en assemblée générale puisque la compétence pour l’édicter lui a été conférée par une disposition des statuts de la société.


Le règlement doit être établi en la forme écrite. L’article 716b al. 2 CO stipule en termes généraux ce que peut contenir ce règlement : (i) il fixe les modalités de la gestion, (ii) détermine les postes nécessaires, (iii) en définit les attributions et (iv) règle en particulier l’obligation de faire rapport.


En pratique, à l’instar du Code suisse de bonnes pratiques pour le gouvernement d’entreprises édicté par economiesuisse (cf. https://www.economiesuisse.ch/fr/publications/code-suisse-de-bonnes-pratiques-pour-le-gouvernement-dentreprise), le règlement contiendra les sections suivantes :


  • Constitution du conseil d’administration (nomination du président, du vice-président, du secrétaire) ;
  • Modalités de la convocation du conseil d’administration (qui convoque, qui peut demander la convocation, fréquence et modalités des séances) ;
  • Mode et conditions d’exercice du droit aux renseignements et à l’information des membres du conseil d’administration ;
  • Modalités de la prise des décisions du conseil d’administration (quorum, majorités) ;
  • Attributions du président du conseil et/ou de l’administrateur-délégué ;
  • Constitution des comités et définition de leurs tâches et de leur fonctionnement ;
  • Gestion des risques et du système de contrôle interne ;
  • Comportement à adopter en cas de conflit d’intérêt d’un membre du conseil.


Le nouveau droit de la SA, en particulier la nouvelle teneure de l’article 716b CO, ne modifie pas les principes qui viennent d’être évoqués. Ceux-ci doivent toutefois être constamment modernisés. La pandémie a montré la fragilité des systèmes classiques de gestion et de fonctionnement des organes de la société anonyme. Les sociétés doivent aujourd’hui se doter d’outils sophistiqués pour préserver leur capacité de gestion et de gouvernance en toutes circonstances. Le simple recours à la loi ne suffit pas. La seule faculté de gérer en présentiel et sous la seule forme écrite est inadaptées aux exigences de la gouvernance moderne. L’élaboration d’un règlement d’organisation moderne, tenant compte des leçons de la pandémie et de l’évolution des techniques en particulier de la digitalisation des échanges commerciaux, est indispensable et fait partie des devoirs qui incombent au seul conseil d’administration, cela quelle que soit la taille de la société anonyme.

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