Droit des sociétés

De nombreuses associations devront dorénavant s’inscrire au Registre du commerce

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Dans le cadre de l’évaluation périodique par les experts du GAFI (Groupe d’action financière), institution intergouvernementale chargée notamment de définir des standards internationaux en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, il a été relevé que la réglementation relative à l’association présentait un risque accru de blanchiment d’argent. Le GAFI a formulé des recommandations en vue de pallier ce risque. La révision du droit de l’association, entrée en vigueur le 1er janvier 2023, intervient dans ce contexte.


L’association est en effet une forme juridique simple à mettre en œuvre et qui est par conséquent largement utilisé tant par des acteurs sophistiqués pouvant avoir des bilans financiers dépassant le milliard de francs suisses (par ex : UEFA, FIFA) que par des associations locales récoltant mille francs de cotisation pour ses dix membres.


Nous avions déjà thématisé cette problématique dans l’un de nos articles lorsque cette modification était à l’étude.


Comme ces modifications sont en vigueur, il apparaît utile de présenter le contenu de cette révision afin que les animateurs d’associations puissent comprendre l’évolution de la réglementation et de s’interroger sur son impact sur la structure de chaque association.


Ce qui change 


La révision du droit de l’association peut se résumer par les trois mesures suivantes :


  1. Elargissement l’obligation de s’inscrire au registre du commerce (art. 61 al. 2 let 3 CC) : Avant l’entrée en vigueur de la révision, seules les associations qui exerçaient une industrie en la forme commerciale pour atteindre leur but et celles qui qui étaient soumises à l’obligation de faire réviser leurs comptes (10 millions de bilan, 20 millions de chiffre d’affaires et 50 emplois à temps plein) étaient tenues de se faire inscrire au registre du commerce (art. 61 al. 2 let. a et b CC).


Avec la révision, cette obligation s’étend aux associations qui, à titre principal, collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à l’étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales (art. 61 al. 2 let. c CC). Une association peut toutefois être exemptée de cette obligation si elle respecte les trois conditions suivantes (art. 90 al. 2 ORC) :


  • L’association n’a pas durant les deux derniers exercices collecté ou distribué plus de CHF 100’000.- ;
  • Les fonds sont distribués par un intermédiaire financier (par exemple banque) ;
  • Au moins un représentant de l’association est domicilié en Suisse.


A titre exemplatif, les associations conçues pour récolter des fonds et les distribuer aux victimes de la guerre en Ukraine ou aux victimes du séisme en Turquie et en Syrie sont concernées.


  1. Etablissement d’une liste de membres (art. 61a CC) : Chaque association inscrite au registre du commerce ou qui doit l’être en application du nouveau droit doit dresser une liste de ses membres laquelle doit contenir le prénom et le nom ou la raison sociale et l’adresse de ceux-ci. La liste doit pouvoir être accessible en Suisse à tout moment. L’association doit conserver les informations relatives à chaque membre et les éventuelles pièces justificatives pendant cinq ans après la radiation du membre concerné.
  2. Obligation d’avoir un représentant en Suisse (art. 69c al. 1 CC): Chaque association inscrite au registre du commerce ou qui doit l’être en application du nouveau droit doit désigner un représentant domicilié en Suisse et ayant accès à la liste des membres garantit aux autorités qu’en cas d’ouverture d’une procédure contre l’association, une personne physique pourra être entendue et fournir les renseignements utiles, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux mécanismes d’entraide internationale.


Comment savoir si une association est concernée et comment s’assurer de sa conformité ?


Nous conseillons aux associations de procéder comme suit :


  1. Déterminer si l’association est tenue de s’inscrire au Registre du commerce. Les critères permettant de le déterminer sont ceux mentionnés ci-dessus (cf. ci-dessus A. 1.)
  1. Si tel n’est pas le cas, la modification législative n’a pas d’incidence.
  2. Si l’association semble soumise à l’inscription obligatoire si les trois conditions citées ci-dessus qui permettent une exemption de l’inscription sont remplies dans le cas d’espèce.
  1. Si l’association peut être exemptée, aucune inscription n’est nécessaire et la modification législative n’a pas d’autres effets. Les conditions de l’exemption sont mentionnées ci-dessus.
  2. Si l’association ne peut pas être exemptée, l’association doit être inscrite au registre du commerce.

  1. Inscription au registre du commerce : Cela requiert la production d’une réquisition et de pièces justificatives. Le contenu de la réquisition est régi par l’art. 92 ORC et la liste des pièces justificatives est mentionnée à l’art. 90 ORC.

  2. Etablir la liste des membres.

  3. Trouver et élire un représentant de l’association ayant son domicile en Suisse.


Les associations disposent d’un délai au 30 juin 2024 pour se conformer à ses obligations (Titre final art. 6bis CC), faute de quoi ses représentants s’exposent aux sanctions décrites ci-dessous.


Quelles sont les conséquences si l’association ne conforme pas aux nouvelles exigences ?


Les conséquences sont de deux types :


  1. Carence dans l’organisation : si la liste des membres n’est pas établie ou que l’association n’a pas de domicile en Suisse, un membre ou un créancier de l’association peut demander à ce que des mesures soient prises pour pallier la situation, ce qui peut mener à sa dissolution.
  2. Conséquences pénales : l’art. 327b du code pénal sanctionne par une amende la violation de l’obligation de tenir une liste des membres et de nommer un représentant domicilié en Suisse.


Les représentants des associations s’exposent ainsi notamment aux sanctions ci-dessous et nous conseillons à chaque personne active au sein d’une association de vérifier si une mise en conformité est nécessaire.



Liens vers les textes pertinents :


Lien vers le code civil suisse (nouvelles dispositions, voir not. art. 61 al. 2 ch. 3 ; art. 61a, 69c al. 1 CC) entrées en vigueur le 1er janvier 2023 :


https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/24/233_245_233/fr


Lien vers l’Ordonnance sur le registre du commerce (nouvelles dispositions, voir not. 90 al. 1 let. c, art. 92 let. j et k, 93 ORC) :


https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/54/757_781_799/fr


Lien vers le Code pénal (voit not. art. 327 b CP).


https://www.fedlex.admin.ch/eli/fga/2022/1638/fr

Vous avez des questions par rapport à la problématique abordée dans cet article ?

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