Droit du travail

La protection de la grossesse, de la maternité et de l’allaitement : un casse-tête pour les employeurs.

Comprendre les dispositions légales en matière de protection de la grossesse, de la maternité et de l’allaitement, et partant les obligations de l’employeur et les droits de l’employée à cet égard, peut s’avérer un vrai « casse-tête » pour l’employeur. Cela est dû au fait que les dispositions légales ne sont pas toujours très claires et surtout qu’elles sont « éparpillées » dans le Code des Obligations, dans la Loi sur le travail (LTr), dans l’Ordonnance 1 relative à la loi sur la travail (OLT 1), dans l’Ordonnance du DEFR sur les activités dangereuses et pénibles en cas de grossesse et de maternité (Ordonnance sur la protection de la maternité), dans la Loi fédérale sur les allocations pour pertes de gain en cas de service et de maternité (LAPG) et également dans la Loi fédérale sur l’égalité (LEG). La matière est également complexe car elle regroupe de nombreuses questions juridiques importantes en matière de droit du travail, comme le droit au salaire, l’incapacité non fautive de travailler, le congé maternité, l’interdiction de travailler pendant une certaine période, le congé donné en temps inopportun, les activités dangereuses ou pénibles, le droit de refuser la prestation de travail etc.


S’agissant du Code des obligations (CO), les dispositions topiques sont les articles 324a et 324b, l’article 329f et l’article 336c alinéa 1 let c).


L’article 324a alinéa 3 CO prévoit expressément que « en cas de grossesse de la travailleuse, l’employeur est tenu de lui verser le salaire dans la même mesure ».


L’article 324b prévoit des exceptions à l’article 324a CO, à savoir « si le travailleur est assuré obligatoirement, en vertu d’une disposition légale, contre les conséquences économiques d’un empêchement de travailler qui ne provient pas de sa faute mais est dû à des raisons inhérentes à sa personne, l’employeur ne doit pas le salaire lorsque les prestations d’assurance dues pour le temps limité couvrent les quatre cinquièmes au moins du salaire afférent à cette période », soit en d’autres termes 80% de la rémunération de l’employé.


Parmi les assurances visées à cet article 324b CO figure notamment l’assurance pour perte de gain qui prévoit des allocations de maternité (LAPG, art. 16b à 16h).


L’article 329f CO prévoit que « en cas de maternité, la travailleuse a droit, après l’accouchement, à un congé d’au moins 14 semaines. ».


Enfin, l’article 336c alinéa 1 let c) CO prévoit que « après le temps d’essai, l’employeur ne peut pas résilier le contrat pendant la grossesse et au cours des seize semaines qui suivent l’accouchement ». L’article 336c ne mentionne cependant pas le cas de la résiliation en temps inopportun en cas d’allaitement au-delà de la 16ème semaine.


En d’autres termes, l’employeur ne peut pas résilier le contrat pendant la grossesse et au cours des 16 semaines qui suivent l’accouchement. Le fait que la mère allaite pendant les 16 semaines ou non, voire allaite au-delà de cette période, n’a pas d’incidence s’agissant de l’application de cet article.


Ainsi, toujours en d’autres termes, après les 16 semaines qui suivent l’accouchement, le licenciement d’une employée qui a accouché et qui allaite encore son enfant n’est pas un licenciement en temps inopportuns au sens de l’article 336c CO.


Il est cependant important de garder à l’esprit que, en application de la LEG, un licenciement motivé par le seul fait que l’employée a accouché ou, après son congé maternité, refuse de travailler durant le temps nécessaire à l’allaitement de son enfant ou devrait rester à la maison pour s’en occuper est discriminatoire.


S’agissant de la LAPG, les dispositions topiques sont les articles 16b à 16h.


L’article 16b LAPG définit les femmes qui ont droit à l’allocation de maternité. Le droit à l’allocation débute en principe le jour de l’accouchement.


Le droit à l’allocation prend fin le 98ème jour à partir du jour où il a été octroyé. Il prend également fin avant ce terme si la mère reprend une activité lucrative ou si elle décède.


L’indemnité journalière d’allocation correspond à 80% du revenu moyen mais au maximum à CHF 196.-


Le versement des indemnités journalières découlant de l’assurance maternité prime sur d’éventuels paiements résultant d’autres assurances sociales.


L’allaitement de l’enfant n’a aucune incidence sur l’application des dispositions de la LAPG.


En d’autres termes, le droit à l’allocation prend fin le 98ème jour à partir du jour où il a été octroyé que la mère allaite encore son enfant ou non.


L’assurance perte de gain de l’employeur peut éventuellement prendre le relai si l’employée se trouve, à ce moment-là, dans un cas d’empêchement de travailler sans faute de sa part pour des causes inhérentes à sa personne en vertu des articles 324a et 324b CO. Pour cela, l’employée doit avoir un certificat médical qui atteste de cet empêchement.


S’agissant de la LTR et l’OLT 1, elles prévoient des règles spécifiques relatives aux conditions de travail durent la maternité et notamment si la mère allaite.


Les femmes qui allaitent doivent voir leur santé protégée et ne peuvent exercer de travaux dangereux (article 35 LTR, 61, 62, 64 et 65 OLT1).


Sur simple demande de la femme qui allaite, une dispense pour travaux qu’elle juge pénible doit lui être accordée. Il s’agit alors d’un critère subjectif.


Lorsque l’employeur lui fournit un travail de remplacement (car le travail initial est pénible ou dangereux), si l’employée accepte le travail de remplacement, elle a droit à l’entier de son salaire. Si elle refuse, elle n’a droit à aucun salaire.


Elle perd donc selon nous, tout droit à rémunération et/ou allocation après la 14ème semaine (dans les cantons qui prévoit un congé maternité de 14 semaines)


Si aucun travail de remplacement ne peut lui être fournit, elle a droit à 80% de sa rémunération usuelle qui doit être payée par l’employeur. Ainsi, dans ce cas, dès la fin du congé maternité et du versement des allocations maternités, l’employeur « prend le relai » et doit verser 80% de sa rémunération.


Même si la loi ne le précise pas, le droit à 80% de la rémunération prend selon nous fin logiquement dès que l’employée n’allaite plus mais au plus tard un an après l’accouchement.


Les femmes qui allaitent ne peuvent être occupée sans leur consentement (article 35a LTR). Elles doivent en effet disposer du temps nécessaire à l’allaitement.


Jusqu’à la 8ème semaine après l’accouchement, que la femme allaite ou non, l’interdiction de travailler est impérative. Entre la 9ème et la 16ème semaine, leur consentement est nécessaire, que la femme allaite ou non.


L’article 60 alinéa 2  LOT1 précise que « les mères qui allaitent peuvent disposer des temps nécessaires pour allaiter ou tirer leur lait. Au cours de la première année de la vie de l’enfant, le temps pris pour allaiter ou tirer le lait est comptabilisé comme temps de travail rémunéré dans les limites suivantes :


a. pour une journée de travail jusqu’à 4 heures : 30 minutes au minimum ;
b. pour une journée de travail de plus de 4 heures : 60 minutes au minimum ;
c. pour une journée de travail de plus de 7 heures : 90 minutes au minimum.


Ainsi, dans ces limites et durant la première année de la vie de l’enfant, l’employée qui allaite a droit à son salaire. Au-delà de ces limites, le temps consacré à l’allaitement n’est pas considéré comme du temps de travail devant être payé.


Si l’allaitement empêche pour des raisons médicales avérées l’employée d’exécuter sa prestation, l’article 324 a CO s’applique à nouveau. En d’autres termes, on se trouve à nouveau dans un cas d’empêchement de travailler sans faute de sa part.


Toujours selon la LTR, entre la 9ème et la 16ème semaine après l’accouchement, l’employée ne peut travailler entre 20h00 et 6h00 que si elle y consent qu’elle allaite ou non.


Dans ce cas, si l’employée n’y consent pas, l’employeur doit proposer une activité équivalente de 20h00 à 6h00. À Défaut, il doit verser 80% du salaire (sous déduction des éventuelles indemnités pour travail de nuit).


Si l’employée qui allaite refuse l’activité équivalente, elle perd tout droit à une rétribution. Elle perd donc selon nous tout droit à rémunération et/ou allocation après la 16ème semaine. Entre la 14ème et la 16ème semaine, selon nous, l’employeur doit cependant versé le 80% du salaire.

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Comme mentionné en introduction, comprendre les dispositions légales en matière de protection de la grossesse, de la maternité et de l’allaitement peut s’avérer un vrai « casse-tête » en raison des nombreuses dispositions légales applicables. Cela est d’autant plus le cas lorsque l’employée allaite son enfant. Nous conseillons donc à l’employeur d’être prudent et de se faire conseiller si une situation problématique se pose.

Vous avez des questions par rapport à la problématique abordée dans cet article ?

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