Droit du travail

Les récents articles de journaux mentionnant que de nombreux apprentis « décrochent en cours d’apprentissage » et « cassent » leur contrat avant terme sont l’occasion de revenir sur ce contrat de travail particulier en droit suisse et de faire un bref rappel et aux employeurs et aux apprentis.

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Le contrat d’apprentissage a la particularité d’être à la fois régi par des dispositions de droit privé et par des dispositions de droit public.


S’agissant des dispositions de droit public, au niveau fédéral, le contrat d’apprentissage est régi par la loi fédérale sur la formation professionnelle (LFPr) et son ordonnance d’application (OFPr)


La LFPR rappelle que « la formation professionnelle est la tâche commune de la Confédération, des cantons et des organisations du monde du travail ».


Selon l’article 14 LFPR, le contrat d’apprentissage est régi « par les dispositions y relatives du code des obligations4 (art. 344 à 346a), à moins que la présente loi n’en dispose autrement ».


L’une des particularités du contrat d’apprentissage est qu’il doit être approuvé par les autorités cantonales. De plus, « si le contrat d’apprentissage est résilié, le prestataire de la formation doit en aviser immédiatement l’autorité cantonale et, le cas échéant, l’école professionnelle ».


En effet, selon l’article 20 LFPR, les entreprises qui souhaitent prendre et former des apprentis doivent avoir obtenu une autorisation du canton.


Au niveau cantonal, le contrat d’apprentissage est régi par les diverses lois ou règlements cantonaux.


Dans le canton de Vaud, il s’agit de la loi sur la formation professionnelle (LVLFPr) et son règlement d’application (RLVLFPr).


La loi vaudoise a pour but de régler l’application dans le Canton de Vaud de la loi fédérale.


S’agissant de l’autorisation, la loi vaudoise précise que l’entreprise doit soumettre le contrat d’apprentissage signé par les parties à l’approbation du département dans le délai fixé par le règlement, soit au plus tard le 31 juillet de l’année d’entrée en formation.


Le règlement vaudois précise également que le « contrat d’apprentissage se termine au plus tard à la fin du mois d’août ». Le règlement précise aussi que les apprentis prennent leurs vacances pendant les périodes de vacances scolaires et que l’employeur doit accorder « au moins trois semaines consécutives de vacances, sauf si des raisons majeures s’y opposent ».


Si le contrat d’apprentissage est soumis tardivement, il est transformé, avec l’accord des parties, en contrat de préapprentissage.


L’autorisation est accordée si :


« a) l’entreprise ou le réseau auquel elle appartient est au bénéfice d’une autorisation de former dont il remplit encore les conditions au moment de la demande d’approbation ;

b) la formation se déroule dans des conditions adéquates, en particulier quant au lieu de travail de la personne à former ;

c) le contrat respecte les normes du contrat d’apprentissage et, le cas échéant, la convention collective de travail applicable ;

d) le certificat médical, pour le cas où celui-ci a été demandé conformément à l’article 11, atteste de l’aptitude de la personne en formation à suivre la formation choisie ;

e) le contrat de réseau est joint à la demande d’approbation s’il s’agit d’une formation en réseau ».


Les modifications du contrat d’apprentissage doivent également être soumises à l’approbation du département.


A noter que l’autorisation peut être annulée ou révoquée si le département estime que la formation est compromise.


Toujours au niveau du droit public, la loi sur le travail comporte également des dispositions particulières s’agissant des jeunes employés qu’ils soient apprentis ou non en matière de repos et de durée du travail.


Sont considérés comme des « jeunes gens » les travailleurs des deux sexes âgés de moins de 18 ans.


De plus, l’Ordonnance 5 porte exclusivement sur la protection des jeunes travailleurs (OLT 5) et comporte notamment des dispositions sur la durée du travail et du repos mais également sur des activités particulières qui peuvent être prohibées ou autorisées à certaines conditions.


Au niveau du droit privé, le contrat d’apprentissage est régi par les articles 344 à 346a du Code des obligations (CO) et est considéré comme un contrat individuel de travail de caractère spécial.


Contrairement au contrat de travail « ordinaire » qui peut être oral ou conclu tacitement, le contrat d’apprentissage n’est valable que s’il est fait par écrit.


Le contrat écrit doit régler la nature et la durée de la formation professionnelle, le salaire, le temps d’essai, l’horaire de travail et les vacances.


Le temps d’essai ne doit pas être inférieur à un mois ni supérieur à trois mois. S’il n’est pas fixé dans le contrat, il est de trois mois. Exceptionnellement, le temps d’essai peut être prolongé jusqu’à six mois, d’entente entre les parties et avec l’approbation des autorités cantonales.


L’article 345a CO impose des obligations particulières à l’employeur. Celui-ci doit notamment veiller à ce que l’apprenti soit formé « sous la responsabilité d’une personne du métier ayant les capacités professionnelles et les qualités personnelles nécessaires ».


Il doit bien entendu laisser à l’apprenti, « sans réduction de salaire, le temps nécessaire pour suivre les cours de l’école professionnelle et les cours interentreprises, et pour passer l’examen de fin d’apprentissage ».


Jusqu’à l’âge de 20 ans révolus, l’employeur doit accorder à l’apprenti au moins cinq semaines de vacances par année d’apprentissage.


Le fait d’occuper la personne en formation à des travaux étrangers à l’activité professionnelle envisagée et à des travaux aux pièces ou à la tâche n’est possible que si cela est en relation avec l’exercice de la profession et que la formation n’est pas compromise.


L’article 346 CO pose quelques règles particulières en matière de résiliation.


Comme pour le contrat de travail « ordinaire », « pendant le temps d’essai, le contrat d’apprentissage peut être résilié en tout temps moyennant un délai de congé de sept jours ».


Le contrat d’apprentissage peut cependant être résilié immédiatement pour de justes motifs dans les cas suivants :


« a) si la personne responsable de la formation n’a pas les capacités professionnelles ou les qualités personnelles nécessaires pour former la personne en formation;

b) si la personne en formation n’a pas les aptitudes physiques ou intellectuelles indispensables à sa formation ou si sa santé ou sa moralité est compromise ; la personne en formation et, le cas échéant, ses représentants légaux, doivent être entendus au préalable ;

c) si la formation ne peut être achevée ou ne peut l’être que dans des conditions essentiellement différentes de celles qui avaient été prévues. »


Pour le surplus, les dispositions du CO sur le contrat de travail « ordinaire », soit les articles 319ss CO, s’appliquent au contrat d’apprentissage. Ce bref rappel sur le contrat d’apprentissage met en lumière le fait que, si la décision d’un employeur de former des apprentis est tout à fait louable et doit être encouragée, elle ne doit pas être prise à la légère et il faut être attentif aux obligations imposées par les dispositions particulières du Code des obligations mais également par le droit public.

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