Droit du bail

Le droit du bail a encore fait parler de lui dans les journaux au debut de ce mois avec notamment le titre suivant : "Le National fait des fleurs aux proprietaires dans le droit du bail". Mais qu'en est-il vraiment ?

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A titre préalable il convient de rappeler que, si le Conseil national a effectivement accepté deux projets visant, selon certains, à « durcir le droit du bail », ces deux objets doivent encore être soumis au Conseil des Etats afin qu’il se prononce. Ce n’est pas encore chose faite et les deux projets ne sont donc pas encore validés.


Premier projet : conditions de la sous-location :


Le premier projet porte sur la sous-location. Son but est d’empêcher les sous-locations abusives. Le projet prévoit que l’accord du bailleur devra dorénavant être donné par écrit. Il prévoit également que le bailleur pourra refuser une sous-location si elle dure plus de deux ans ou présente des inconvénients majeurs pour lui.


Actuellement, la sous-location est régie par l’article 262 CO.


Selon cet article, « le locataire peut sous-louer tout ou partie de la chose avec le consentement du bailleur ». Le consentement du bailleur est donc déjà nécessaire et, en pratique, le consentement est la plupart du temps donné par écrit. Il est d’ailleurs conseillé à un locataire prudent de demander le consentement par écrit. Le projet ne semble donc pas changer grand-chose sur ce point.


Toujours selon cet article, « le bailleur ne peut refuser son consentement que :


  1. si le locataire refuse de lui communiquer les conditions de la sous-location;
  2. si les conditions de la sous-location, comparées à celles du contrat de bail principal, sont abusives;
  3. si la sous-location présente pour le bailleur des inconvénients majeurs ».


Le bailleur peut donc déjà actuellement refuser son accord si la sous-location présente des inconvénients majeurs.


Quant à la durée de la sous-location, l’article 262 CO n’en parle pas mais, par essence, la sous-location doit rester provisoire. En d’autres termes, elle doit être limitée dans le temps.


En effet, actuellement, la sous-location est admise notamment si le locataire principal quitte pendant quelques mois son logement (par exemple pour un déplacement à l’étranger) et souhaite sous-louer son logement pendant cette période. Le locataire principal entend donc bien récupérer son logement à son retour et la sous-location ne doit pas être définitive.


Dans la pratique, il n’est pas rare que les bailleurs ou les gérances acceptent des sous-locations limitées à une durée de six mois. Au-delà de cette période (qui peut se discuter) mais surtout au-delà d’une période de deux ans, la sous-location n’est plus provisoire et la volonté du locataire de récupérer son logement est douteuse (sauf bien évidemment cas particulier).


Le projet ne semble donc pas non plus changer grand-chose sur la question de l’inconvénient majeur et surtout sur la question de la durée. Au contraire, sur ce dernier point, le projet semble finalement concrétiser ce qui est déjà fait en pratique.


Deuxième projet : simplification de la résiliation du bail pour besoin propre du bailleur


Quant au second projet, il vise à simplifier les résiliations du bail pour besoin propre du bailleur et à assouplir les conditions relatives à l’urgence de ce besoin.


Actuellement, le besoin urgent du bailleur est mentionné dans plusieurs articles.


L’article 271a CO porte sur l’annulabilité du congé donné par le bailleur et donne des cas dans lesquels le congé est annulable.


Il prévoit que le congé n’est pas annulable, pendant une procédure de conciliation ou une procédure judiciaire en rapport avec le bail, ou dans les trois ans à compter de la fin d’une procédure de conciliation ou d’une procédure judiciaire, si le congé est donné « en raison du besoin urgent que le bailleur ou ses proches parents ou alliés peuvent avoir d’utiliser eux-mêmes les locaux ».


L’article 272 CO porte sur la prolongation du bail. Cet article prévoit que, lorsqu’un locataire demande une prolongation du bail suite à une résiliation, dans la pesée des intérêts qu’il doit faire, le juge doit notamment prendre en compte « le besoin que le bailleur ou ses proches parents ou alliés peuvent avoir d’utiliser eux-mêmes les locaux ainsi que l’urgence de ce besoin ».


Le besoin urgent est également mentionné à l’article 261 CO qui concerne l’aliénation de l’objet loué.


Selon cet article, le nouveau propriétaire peut notamment, « pour les habitations ou les locaux commerciaux, résilier le bail en observant le délai de congé légal pour le prochain terme légal s’il fait valoir un besoin urgent pour lui-même ou ses proches parents ou alliés ».


Pour l’instant, on ne sait pas si le projet porte sur tous ces articles et comment les conditions relatives à l’urgence du besoin seront assouplies.


Cela étant, actuellement, il peut être très compliqué – et surtout très long – pour un bailleur de récupérer son bien et ce même s’il arrive à démontrer qu’il veut le récupérer pour lui-même ou pour ses proches parents. Cela est encore plus compliqué lorsqu’il s’agit d’un achat d’un appartement ou d’une maison louée pour y habiter soi-même.


Si les deux projets qui ont été acceptés par le Conseil national ont fait bondir certains, comme mentionné ci-dessus, ils doivent encore être validés par le Conseil des Etats. De plus, ils ne modifient pas fondamentalement ce qui est déjà prévu dans le droit du bail actuel et semblent plutôt, s’agissant en tout cas de la sous-location, concrétiser ce qui est déjà fait en pratique.

Vous avez des questions par rapport à la problématique abordée dans cet article ?

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