Litiges en droit commercial

Bon à savoir en droit des poursuites

En droit des poursuites, la notification des différents actes soulève des questions intéressantes et demande une attention particulière. Nous allons traiter ci-après, de deux exemples récents de notre pratique, qui exposent les astuces et procédures auxquelles il faut être attentif.


CAS 1 : un commandement de payer peut être gardé confidentiel


« Un client nous a récemment contacté car il souhaite qu’une poursuite, introduite à son encontre il y a deçà une année, à laquelle il a fait opposition et qui ne s’est pas poursuivie par une action au fond, soit radiée de son extrait du registre des poursuites ».


Aujourd’hui, en vertu de l’article 85a al. 1 LP, le débiteur qui a fait opposition au commandement de payer qui lui a été notifié peut ouvrir une action civile au for de la poursuite pour faire constater que la dette n’existe pas ou plus.


Si le débiteur ne souhaite pas supporter les frais d’une action judiciaire, il peut tout simplement demander au créancier de retirer sa poursuite. Dans ce cas, c’est au créancier qu’il appartiendra d’adresser une demande de radiation à l’Office des poursuites. En pratique, un tel accord n’est toutefois pas fréquent. A défaut, la poursuite figurera pendant cinq ans dans l’extrait du registre des poursuites du débiteur.


Une autre solution est celle qui figure désormais à l’article 8a al. 3 let d LP, entré en vigueur le 1er janvier 2019, D’après cette disposition, « les offices ne doivent pas porter à la connaissance de tiers les poursuites pour lesquelles une demande du débiteur dans ce sens est faite à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la notification du commandement de payer, à moins que le créancier ne prouve, dans un délai de 20 jours imparti par l’office des poursuites, qu’une procédure d’annulation de l’opposition (art. 79 à 84) a été engagée à temps; lorsque la preuve est apportée par la suite, ou lorsque la poursuite est continuée, celle-ci est à nouveau portée à la connaissance de tiers ».


Grâce à ce nouvel article, le débiteur peut adresser un courrier à l’Office des poursuites de son lieu de domicile par lequel il demande à ce que la poursuite figurant sur son extrait du registre des poursuites ne soit plus communiquée à des tiers. Il fera par ailleurs attention d’y joindre une copie du commandement de payer relatif à la poursuite en question.


Pour autant que cette demande ait été faite à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la notification du commandement de payer, l’Office va informer le créancier de cette requête. Ce dernier aura alors un délai de 20 jours pour démontrer qu’il a engagé une procédure d’annulation de l’opposition.


Passé ce délai, la poursuite ne sera pas radiée, mais elle ne figurera plus sur l’extrait du registre des poursuites du débiteur. Cette solution intermédiaire permet au client de trouver satisfaction dans le cas où il n’aurait, par exemple, pas le temps, l’argent ou l’envie de se livrer à une bataille judiciaire.


CAS 2 : une poursuite est valable si le commandement de payer a été effectivement notifié dès que la créance est devenue exigible


Pour mettre en poursuite un débiteur, il faut non seulement avoir une créance mais il faut également que celle-ci soit exigible. A ce titre, un créancier est venu nous consulter avec la question suivante : « Quels sont les risques d’une réquisition de poursuite envoyée à l’Office des poursuites le 27 février 2019 alors que la créance n’était exigible qu’à partir du 29 février 2019, sachant que l’Office des poursuites a notifié le commandement de payer au débiteur le 1er mars 2019 (dates fictives) ? »


La question se pose donc de savoir quel est le moment déterminant en droit des poursuites. La créance doit-t-elle être exigible au moment de la réquisition de poursuite ou au stade de la notification du commandement de payer au débiteur ?


Conformément à l’article 38 al. 2 LP et à la jurisprudence du Tribunal fédéral la plus récente, la créance doit être exigible au plus tard lors de l’introduction de la poursuite, c’est-à-dire à la date à laquelle le commandement de payer a été effectivement notifié au débiteur. En effet, c’est la notification du commandement de payer qui scelle le rapport procédural de droit des poursuites liant le poursuivant, le poursuivi et les autorités de poursuites (cf. Stéphane Abbet et Ombre Veullet, La Mainlevée d’opposition, Berne, Stämpfli, 2017, page 136 et la jurisprudence citée à la note 233 soit 5A_785/2016 considérant c.3.2.2 et 5A_954/2015 considérant c.3.1 ; Dominique Rigot, Commentaire romand – poursuite et faillite, Bâle, Helbing & Lichtenhahn, 2005, page 116).


En conclusion, le moment déterminant pour l’exigibilité d’une créance correspond à la date de la notification du commandement de payer et non pas à la date de l’envoi de la réquisition de poursuite, comme cela a été le cas par le passé. Dans le cas cité plus haut, même si la réquisition de poursuite a été envoyée avant que la créance ne soit exigible, le commandement de payer a été notifié au débiteur après l’exigibilité de la créance et il est donc valable.


Touchant un grand nombre de personnes, le droit des poursuites est un domaine du droit dans lequel l’avocat est fréquemment sollicité dans sa pratique. Afin d’éviter des embûches, il sied d’être attentif aux nouvelles législations et jurisprudences rendues en la matière.


WILHELM Avocats SA vous conseille en matière de droit de la poursuite et de la faillite.

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