Droit des sociétés

La tenue des assemblées générales des actionnaires en période de coronavirus

La pandémie actuelle de coronavirus complique singulièrement la tâche des personnes chargées d’organiser les assemblées générales des sociétés anonymes, qu’elles soient cotées ou non.


En effet, le 16 mars 2020, Conseil fédéral a renforcé les mesures de protection de la population en passant au niveau « situation extraordinaire » de la loi sur les épidémies. Tous les magasins, restaurants, bars et établissements de divertissements et de loisirs sont fermés jusqu’au 19 avril 2020. Cette limitation ne s’applique pas aux magasins d’alimentation et aux établissements de santé. Certains cantons ont pris des mesures complémentaires comme le canton de Vaud qui a interdit tout rassemblement de plus de dix personnes.


Les sociétés anonymes par le biais de leur conseil d’administration restent toutefois tenues de convoquer une assemblée générale ordinaire des actionnaires dans un délai de six mois suivant la clôture de l’exercice et des assemblées extraordinaires aussi souvent qu’il est nécessaire (art. 699 al. 2 CO). Bien que le délai de six mois soit un délai d’ordre dont la violation ne comporte en tant que telle aucune sanction, les sociétés anonymes ont tout intérêt à ce que les assemblées générales puissent être tenues dans ce délai, a fortiori lorsque des décisions importantes comme des augmentations de capital ou des modifications statutaires doivent être prises. De plus, les assemblées générales des actionnaires doivent être organisées selon le principe de l’immédiateté qui exige que les actionnaires soient physiquement présents ou représentés afin de pouvoir débattre librement et exercer le droit de vote. Cela exclut la possibilité de voter par correspondance, par téléphone ou de prendre les décisions par voie de circulation.


Au vu de cette situation extraordinaire, le Conseil fédéral a modifié l’Ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le COVID-19 (Ordonnance 2 COVID-19) (https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/60666.pdf) en prévoyant une exception au principe de l’immédiateté décrit ci-dessus. Ainsi, l’art. 6a Ordonnance 2 COVID-19 autorise les organisateurs des assemblées de société quel que soit le nombre prévu de participants et sans respecter le délai de convocation à imposer aux actionnaires de faire valoir leurs droits (droit de vote, droit de poser des questions au conseil d’administration) par écrit ou sous forme électronique ou par l’intermédiaire d’un représentant désigné par l’organisateur. L’organisateur doit cependant informer les actionnaires au plus tard quatre jours avant l’assemblée. L’art 12 al. 6 de l’Ordonnance 2 COVID-19 prévoit que ces mesures ont un effet jusqu’au 19 avril 2020.


Si le conseil d’administration entend faire usage de ce nouvel art. 6a, nous conseillons au conseil d’administration d’informer l’actionnaire de façon claire afin de lui permettre d’exercer ses droits. A cet effet, le conseil d’administration sera bien avisé de présenter de façon transparente et complète les décisions qui doivent être prises lors de l’assemblée générale. Il invitera l’actionnaire à prendre position sur ces points. De même, l’actionnaire doit pouvoir poser des questions au conseil d’administration en relation avec les objets portés à l’ordre du jour. Les réponses à ces questions pourront être protocolées au procès-verbal de l’assemblée générale ou adressées individuellement à l’actionnaire. Enfin, à notre sens, la façon la plus efficace de gérer cette situation consiste pour le conseil d’administration à nommer un représentant indépendant – qui est obligatoire pour les sociétés cotées (art. 8 ORAb). Dans ce cas, le conseil d’administration donnera aux actionnaires dans la convocation toutes les informations utiles sur la personne du représentant indépendant et les modalités d’exercice du droit de vote.


La situation de pandémie actuelle impose à tout un chacun d’adapter sa vie quotidienne. Cela s’applique également aux sociétés anonymes qui doivent concilier les impératifs de la continuité des affaires à leur responsabilité sociale de contenir la propagation du virus. Nous sommes d’avis que le Conseil fédéral a trouvé une façon intelligente pour concilier ces exigences contradictoires.


WILHELM Avocats SA – Me Steve GOMES – 17.03.2020

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