Droit du travail

Les mesures du Conseil fédéral dans le domaine de la justice du droit procédural dans le cadre de la lutte contre le COVID-19

La pandémie actuelle de COVID-19 a eu des répercussions importantes sur l’activité des tribunaux helvétiques. En effet, les mesures d’hygiène de l’Office fédérale de la santé publique, les mesures d’éloignement social, ainsi que l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes ont contraint les tribunaux à annuler purement et simplement les audiences qui ne concernaient pas des procédures urgentes.


Conscient des problèmes que peut causer une immobilisation de la justice sur une longue période, le Conseil fédéral a allégé certaines règles de procédure civile et de droit des poursuites afin de concilier les exigences liées à la lutte contre le COVID-19 et la reprise de l’activité judiciaire. Cela s’inscrit dans la stratégie globale de déconfinement du Conseil fédéral présentée lors d’une conférence de presse le 16 avril 2020.


Les mesures précitées sont contenues dans l’Ordonnance instaurant des mesures en lien avec le coronavirus dans le domaine de la justice et du droit procédural (Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural). Les mesures principales sont les suivantes :


Procédure civile :


  • Les audiences peuvent être tenues par vidéoconférences ;
  • L’audition de témoins et d’experts peut être effectuée par vidéoconférence ;
  • Le Tribunal peut renoncer à la tenue d’une audience et mener la procédure par écrit lorsque le recours à la téléconférence n’est pas possible ou ne peut être exigé et qu’il y urgence, à moins que de justes motifs ne s’y opposent ;


Ce n’est toutefois que lorsque les parties à la procédure consentent ou que des justes motifs le commandent qu’une vidéoconférence peut être organisée. L’urgence constitue un juste motif selon l’art. 2 al. 1 de l’Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural.


Le Conseil fédéral invite toutefois les tribunaux à s’assurer que le son et le cas échéant l’image parviennent simultanément à tous les participants, à ce qu’un enregistrement audio et le cas échéant vidéo soit versé au dossier et à ce que la sécurité des données soit assurée.


Les tribunaux seront chargés de mettre en œuvre ces diverses solutions. A ce titre, l’Ordre judiciaire vaudois a communiqué que les audiences physiques se tiendront à nouveau à partir du 27 avril 2020 dans le respect des prescriptions sanitaires de l’OFSP.


Il s’agit certes d’une solution créative aux problèmes posés par la situation de pandémie actuelle, elle n’est cependant pas sans risque. En effet, en cas de recours à la vidéoconférence, le juge et les parties ne peuvent pas vérifier les conditions d’audition, soit notamment si les parties ou les témoins sont accompagnés de tiers hors champ durant l’audition ou si les parties ou les témoins lisent leurs réponses sur un écran.


De même, il n’est pas certain que les tribunaux disposent des outils techniques nécessaires à la mise en place de telles audiences. De même, les impératifs liés à la sécurité des données limitent le choix des plateformes de vidéoconférence.


Droit des poursuites


Le Conseil fédéral a également édicté des règles spéciales en matière de droit des poursuites dont les principales sont les suivantes :


  • Notification des décisions des autorités et actes de poursuite : Contrairement à ce qui prévalait avant la pandémie, les autorités et les offices sont désormais habilités à notifier des décisions et des actes de poursuites (par ex. : commandement de payer) sans qu’un reçu ne prouve la notification. Les autorités ainsi que l’office peuvent ainsi notifier les actes précités par un simple courrier a+ lorsqu’une première tentative de notification par la voie ordinaire a échoué ou lorsque des circonstances laissent à penser qu’une notification ordinaire serait vouée à l’échec ou lorsque le destinataire a été informée par écrit ou par téléphone au plus tard la veille de la notification.
  • Restitution des délais : Les offices des poursuites et des faillites sont compétents en lieu et place de l’autorité de surveillance ou du juge pour statuer sur les requêtes de restitution de délai.
  • Déroulement des enchères : Les offices peuvent procéder à la vente de biens meubles par le biais de plateforme de vente en ligne accessible au public, en sus des possibilités existantes des enchères publiques et de la vente de gré à gré.


La notification des décisions et actes de poursuite sans reçu est à notre sens problématique, car la notification de tels actes peut entraîner des conséquences graves pour le débiteur qui peut se voir déchu de ses droits, sans qu’il n’en soit au courant. En effet, un débiteur dispose d’un délai de dix jours pour s’opposer à un commandement de payer. Il est tout à fait imaginable qu’un débiteur ne puisse relever son courrier ou ne se rende pas à son domicile pendant une période importante. Or, cela peut déboucher sur l’échéance du délai d’opposition du commandement de payer. Les conditions présidant à la restitution des délais sont restrictives et il ne restera plus au débiteur que la possibilité de contester la créance par une procédure judiciaire ordinaire, dont il devra avancer les frais. La situation actuelle ne justifie selon nous pas une telle entaille dans les droits du débiteur.


S’agissant de l’utilisation de plateforme en ligne pour les ventes aux enchères, cela permettra à un cercle plus large de personnes d’accéder et de participer aux enchères. La facilitation des conditions d’accès aux ventes aux enchères pourrait conduire à une augmentation des offres et ainsi à une augmentation des prix de vente ce qui bénéficiera aux créanciers.

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