Que l’on soit étudiant(e), trentenaire ou dans la force de l’âge, la colocation a le vent en poupe. Mais attention, la colocation peut être épineuse quand un colocataire, mais pas les autres, souhaite y mettre fin, soit quitter l’appartement et ne plus être sur le bail ou résilier le bail !
En droit suisse, une ou plusieurs personnes peuvent être inscrites sur un contrat de bail et donc être colocataires.
Le fait d’être colocataire a des conséquences importantes au niveau juridique et vis-à-vis du bailleur et il est important d’en être conscient avant de décider de vivre en colocation.
Une de ces conséquences est que les colocataires sont débiteurs solidaires. Cela signifie que chaque colocataire est redevable de l’entier du loyer. En d’autres termes, le propriétaire peut rechercher l’un ou l’autre colocataire pour l’entier du loyer et non seulement pour une part proportionnelle. Ainsi, si un colocataire ne paye pas sa part, les autres peuvent être recherchés et mis en poursuite pour l’entier du loyer par le bailleur. Cette responsabilité solidaire pour l’entier du loyer perdure aussi longtemps que le/la colocataire reste inscrit sur le bail et même s’il/elle a quitté dans les faits l’appartement depuis longtemps.
Une autre de ces conséquences est que les colocataires ont, pour certains actes en lien avec le bail, la légitimation active et sont consorts. Cela signifie qu’ils doivent agir en commun. C’est notamment le cas pour la résiliation du bail. Tous les colocataires doivent ainsi accepter de mettre un terme au bail (pour son échéance et dans les délais) et doivent signer la lettre de résiliation du bail qui est adressée au bailleur. Ainsi, si un ou plusieurs colocataires refusent et ne signent pas la lettre de résiliation, cette résiliation n’est pas valable et n’aura aucun effet. Elle ne libèrera donc pas les colocataires qui veulent partir et qui ont signé et adressé la lettre de résiliation.
Quand la relation entre les colocataires est paisible et sans accroche, cela ne pose pas de problème. Cela peut devenir beaucoup plus épineux en cas de litige entre les colocataires, par exemple lorsque l’un d’eux ne paye plus sa part, lorsque l’un d’eux veut quitter la colocation et ne plus être sur le bail ou lorsque l’un veut résilier le bail alors que les autres souhaitent rester.
Dans ces cas épineux, les colocataires sont considérés comme formant une société simple.
La société simple est régie, dans le Code des Obligations (CO), aux articles 530 et suivants.
En vertu de l’article 530 CO, la société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d’unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d’atteindre un but commun. Dans le cas de la colocation, le but commun est la vie commune dans un appartement avec un partage de celui-ci et un partage du loyer.
En application de l’article 545 CO, la colocation prend fin dans les cas suivants :
– par le fait que le but social est atteint ou que la réalisation en est devenue impossible : ce sera le cas si le bailleur résilie le bail.
– par le décès de l’un des colocataires : mais le bail va continuer à se poursuivre vis-à-vis du bailleur.
– par la volonté unanime des colocataires : les colocataires doivent alors résilier le bail pour son échéance et dans le délai de résiliation, en commun, et donc en signant tous la lettre de résiliation.
– par l’expiration du temps pour lequel la société a été constituée : ce sera notamment le cas si le bail est conclu pour une durée déterminée avec une fin du bail automatique à l’échéance.
– par la dénonciation du contrat par l’un des colocataires, si la société simple a été formée pour une durée indéterminée : dans ce cas, le colocataire, qui veut mettre un terme à la société simple, doit provoquer la dissolution de la société simple en dénonçant celle-ci avec un préavis donné six mois à l’avance. La dénonciation doit cependant avoir lieu selon les règles de la bonne foi et ne pas être faite en temps inopportun. La dénonciation de la société simple par un des colocataires n’a cependant aucune incidence pour le bailleur. En d’autres termes, aussi longtemps que le bail n’est pas résilié par tous les colocataires, il reste en vigueur et les colocataires restent solidairement responsables du loyer. Cela vaut également pour le colocataire qui a dénoncé la société simple.
– par un jugement, dans les cas de dissolution pour cause de justes motifs : en cas de désaccord entre les colocataires, le colocataire, qui souhaite partir et ne plus figurer sur le bail ou qui souhaite résilier le bail alors que les autres ne le souhaitent pas, n’aura peut-être pas d’autre choix que de suivre la voie de l’action judiciaire. Il devra donc déposer une action en justice afin d’obtenir un jugement confirmant la dissolution de la société simple, soit la fin de la colocation. Cette action devra être intentée à l’encontre de tous les colocataires figurant sur le contrat de bail.
Mais attention, même si la dissolution de la société simple, soit de la colocation, est ordonnée par un juge, cela n’a pas d’effet vis-à-vis du bailleur. Comme en cas de dénonciation, aussi longtemps que le bail n’est pas résilié par tous les colocataires, il reste en vigueur et les colocataires restent solidairement responsables du loyer.
Mais bien entendu, un accord avec le bailleur est toujours possible et, si celui-ci accepte que l’un des colocataires ne figure plus sur le bail ou soit remplacé par une autre personne, il n’est plus nécessaire d’agir en justice.
Si le choix de vivre en colocation est fait, au vu des conséquences juridiques importantes et des conséquences vis-à-vis du bailleur, les conseils de l’auteure soussignée sont les suivants :
– Si cela est financièrement possible, la personne figurant en premier sur le bail a peut-être intérêt à rester seule titulaire du bail mais à sous-louer une partie de son logement (avec l’accord du bailleur et aux conditions posées par le CO à la sous-location). Certes, la personne figurant seule sur le bail sera redevable de l’entier du loyer à l’égard du propriétaire mais elle gardera la maîtrise du bail et de la décision d’y mettre fin ;
– faire un contrat clair de colocation à faire signer à tous les colocataires. Certes, ce contrat ne sera pas opposable au bailleur mais il aura l’avantage de régler les relations internes entre les colocataires qui forment une société simple.
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