Droit du travail

Le congé paternité : qu’est-ce qui attend les pères et les employeurs ?

Le congé paternité a fait beaucoup parler de lui ces dernières semaines avec le retrait de l’initiative populaire « Pour un congé de paternité raisonnable – en faveur de toute la famille », qui avait été déposée en juillet 2017 et qui souhaitait un droit à un congé de paternité rémunéré d’au moins quatre semaines. Ce retrait fait suite à la position du parlement et au contre-projet en faveur d’un congé paternité de deux semaines. A ce jour, il semble qu’un référendum soit peu probable et il est donc vraisemblable que le contre-projet sera adopté et que le congé paternité entrera en vigueur en 2021. Que prévoit ce contre-projet et quelles seront les principales conséquences pour les pères mais également pour les employeurs ?


Comme le congé maternité, le congé paternité sera financé par le régime des allocations pour perte de gain (APG).


Ainsi, le contre-projet prévoit une modification de la Loi sur les allocations perte de gain (LAPG).


Selon la LAPG modifiée, l’homme qui est légalement le père de l’enfant au moment de la naissance de ce dernier aura en principe droit à une allocation de paternité. Le lien de filiation peut cependant être établi plus tard. Dans ce cas, l’homme qui est reconnu légalement comme étant le père de l’enfant dans les six mois qui suivent la naissance a également droit à l’allocation de paternité. Si le lien de filiation est établi après six mois, le père n’a pas droit à l’allocation de paternité.


Comme pour le congé maternité, pour avoir droit à l’allocation, le père doit également avoir été assuré obligatoirement durant neuf mois précédant la naissance de l’enfant, avoir exercé une activité lucrative durant cinq mois et être salarié ou exercer une activité indépendante au jour de la naissance.


L’allocation de paternité devra être perçue au cours des six mois qui suivent la naissance de l’enfant. Comme pour le congé maternité, l’allocation sera versée sous forme d’indemnités journalières. L’indemnité sera équivalente à 80% du revenu moyen de l’activité lucrative du père obtenu avant la naissance de l’enfant. Elle est cependant plafonnée à CHF 196.- par jour.


Bien évidemment, le contre-projet prévoit également une modification du Code des Obligations (CO). C’est principalement cette modification qui intéresse les employeurs.


Le contre-projet prévoit un nouvel article 329g du CO intitulé « congé de paternité ». Selon ce nouvel article, tout travailleur dont le contrat est soumis au droit privé a droit au congé paternité. Les pères, qui ont un contrat de travail soumis au droit privé, qui n’ont pas droit à l’allocation de paternité car les conditions susmentionnées ne seraient pas remplies, ont quand même droit au congé de paternité. Une distinction est donc faite entre le droit au congé lui-même et le droit à l’allocation de paternité.


Contrairement à l’interdiction qui est faite à la mère de travailler pendant une certaine période après l’accouchement, le congé paternité est un droit que le père peut exercer, mais non une obligation. En d’autres termes, si le père renonce à exercer son droit, il ne peut pas y être forcé. Si le père renonce à exercer son droit ou ne prend effectivement pas le congé, il perd ce droit.


Le congé de deux semaines peut être pris en bloc, par semaines ou par journées. Il peut donc être fractionné. La durée d’une part de congé ne peut cependant pas être inférieure à une journée.


Contrairement à la protection de la mère pendant la grossesse et le congé maternité, le contrat de travail du père, qui a droit à un congé de paternité, peut être résilié. Son contrat de travail peut donc être résilié avant, après ou pendant le délai cadre de six mois.


Lors de la résiliation, si le père n’a pris qu’une partie du congé, il pourra prendre le solde jusqu’à l’échéance de son contrat de travail. Le délai de congé pourrait même être prolongé du nombre de jours qu’il reste à prendre. Cependant, le père qui ne prend pas le congé de paternité avant la fin du contrat prolongé perd son droit.


Si, dans l’ensemble le contre-projet ne porte pas le flanc à la critique, des questions subsistent. Ainsi, que se passe-t-il par exemple si l’employé n’a pas droit à l’allocation de paternité, mais a le droit de prendre le congé de deux semaines. Est-ce un congé payé par l’employeur ou un congé non payé ? Autre question : si le contrat de travail est résilié alors que l’employé n’a pas encore pris son congé de paternité, est-ce que le délai de congé est automatiquement prolongé de deux semaines même si l’employé ne prend pas le congé ? et dans ce cas, est-ce que l’employé doit travailler et donc l’employeur lui verser un salaire ? Il sera peut-être répondu à ces questions avant l’entrée en vigueur du congé paternité. A défaut, c’est la pratique et les tribunaux qui y répondront lorsqu’un litige se présentera.


Pour terminer, il convient de garder à l’esprit que le comité d’initiative a retiré son initiative pour autant qu’il n’y ait pas de référendum. Le comité entend également lancer un projet de congé parental. Ainsi, après le congé maternité et maintenant le congé paternité, ce sera peut-être le congé parental qui fera parler de lui dans quelques années.

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