Protection des données

Est-il possible d’accéder au dossier médical d’un défunt ?

Les données des dossiers médicaux tenus par les médecins et cliniques privées sont protégées notamment par la Loi fédérale sur la protection des données (LPD) et l’Ordonnance sur la protection des données (OLPD).


Cette protection n’empêche toutefois pas d’y accéder. En effet, l’art. 8 LPD confère un droit d’accès, ce qui implique qu’il est possible d’obtenir en tout temps son dossier médical.


La question est de savoir si ce droit peut également être exercé par des tiers lorsque le patient est décédé. L’on pense en particulier à ses enfants, son époux(se) ou son partenaire enregistré, qui demanderait à accéder au dossier du de cujus.


L’art. 1 al. 7 OLPD dispose que « la consultation des données d’une personne décédée est accordée lorsque le requérant justifie d’un intérêt à la consultation et qu’aucun intérêt prépondérant de proches de la personne décédée ou de tiers ne s’y oppose. Un intérêt est établi en cas de proche parenté ou de mariage avec la personne décédée ».


Dans un arrêt ATF 1P.359/2001 (cons. d), le Tribunal fédéral a précisé qu’il « impose une pesée soigneuse des intérêts, mettant en balance d’une part l’intérêt à consulter le dossier médical d’un proche décédé et, d’autre part, la protection du défunt, lequel doit en principe être assuré que les renseignements figurant dans son dossier ne seront pas divulgués après son décès. On ne saurait en effet présumer, […] , que le défunt, même s’il était profondément lié avec ses proches, ait de ce seul fait admis que son dossier médical soit accessible sans restrictions à ceux-ci. »


En pratique, pour exercer le droit d’accès, les proches devront s’adresser par écrit au médecin, respectivement à la clinique, en prouvant leur identité. Nous recommandons de fournir déjà à ce stade une preuve de leur lien avec le défunt, par exemple grâce à une copie du certificat d’héritier, ainsi que l’exposé de leur intérêt à consulter le dossier.


Si, après l’issue de la pesée des intérêts, celui de la personne demandant l’accès est jugé prépondérant, le maître du fichier donnera accès, en veillant toutefois à être préalablement délié de son obligation de secret professionnel auprès de l’autorité compétente (art. 321 CP) ainsi que son éventuel secret de fonction.


Le Tribunal fédéral confirme d’ailleurs dans l’arrêt précité (cons. d) que le dossier médical d’une personne décédée ne saurait être totalement inaccessible, car cela empêcherait la succession de rechercher les éventuelles responsabilités du corps médical. La consultation par le biais d’un médecin, chargé d’en retransmettre le contenu accessible aux intéressés, particulièrement lorsque le dossier médical contient des données sur les rapports du patient avec les membres de sa famille, apparaît comme une mesure adéquate.


Une fois délié, le maître du fichier transmettra, en principe gratuitement, l’original ou une copie dudit dossier médical, duquel il pourra toutefois retrancher les notes personnelles, à savoir celles rédigées exclusivement à des fins personnelles et qui ne servent pas au traitement proprement dit, c’est-à-dire de purs moyens mnémotechniques.


L’on relèvera que la LPD est actuellement en cours de révision totale. Le projet contient un article 16 nLPD spécifique aux données de personnes décédées et qui énumère les conditions auxquelles il est possible d’accéder au dossier médical d’un défunt.


WILHELM Avocats SA  – 15 octobre 2018

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